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25 juin 2010 5 25 /06 /juin /2010 05:42

P1000001BIOGRAPHIE : ERNESTINE LORAND

 

 

La biographie d'Ernestine que l'on peut aussi définir comme une histoire de vie sociale dans le Pays gallo est le fruit d'un travail de recherche d'une durée de cinq ans, Ernestine me recevait généralement dans sa cuisine une fois par mois. Chaque fois, nous partagions le déjeuner tout en conversant en gallo et français ce qui m'a permis d'enregistrer les changements de codes linguistiques que la sociolinguiste américaine Sh. POPLACK définit comme code-switching (Linguistics, 1980). Cette biographie d'Ernestine a été publiée par les Editions L'Harmattan en 1995. De fait, elle est précédée d'une analyse ethno-socio-linguistique que j'ai effectuée pour ma thèse de doctorat en sciences de l'éducation et sociolinguistique intitulée "Dynamique interculturelle et Autoformation - Une histoire de vie en pays gallo", parue aux Editions l'Harmattan en 1995. J'avais demandé aux Editions L'Harmattan de publier ce travail de recherche en ethno-socio-linguistique en deux parties, afin de permettre à de nombreux habitants de Haute-Bretagne de pouvoir lire la Biographie bi-lingue d'Ernestine indépendamment du travail scientifique. Hélas, ce ne fut pas possible et le livre présente donc deux parties différenciées de 386 pages. Lors de la sortie de ce livre, la Mairie de Concoret fit une fête qui regroupa plus de 200 personnes dont tous les élus de la région, c'est dire l'intérêt que suscita cette biographie d'Ernestine en gallo et français. Le journal Ouest-France, plus important tirage de journaux en France, lui consacra une page entière et il fut suivi par la rédaction de France 3 le 24/10/1995, avec notamment une émission télévisée de 1h 30 avec Ernestine et moi, en direct du Centre culturel breton Ty Kendalch de St Vincent/Oust animée par Nathalie KERRIEN (cf. archive audiovisuelle INA d'une durée de 1h 30). C'est une belle aventure qui a continué puisqu'Ernestine a réalisé par la suite des cassettes de chansons gallèses ainsi que des recueils de poésies.

                            Il ne s'agit pas ici de transcrire de nouveau la biographie d'Ernestine mais plutôt de donner quelques pistes de lecture du livre afin de bien saisir ce qui en a fait son originalité. Pour des raisons scientifiques, dans le livre figure l'intégralité des récits d'Ernestine telle que nous les avons enregistrés, en sachant que je ne lui ai jamais demandé de parler en gallo, ce qui présente l'intérêt de pouvoir saisir vraiment les alternances de langues d'Ernestine dans une recherche autant sociolinguistique qu'ethnographique puisqu'Ernestine m'avait demandé, notamment, de l'emmener chez son frère en Normandie où nous avons vécu une semaine complète en famille. Un exemple de "code-switching" ou "commutation de code" nous est fourni dans le récit suivant : " Parfois, j'allais garder les vaches avec grand-mère. Elle avait l'habitude de mettre la corde d'une vache à son poignet, tout en brochant ses chaùsses. Ce jour-là, elle était donc bien tranquille à garder sa vache quand, tout à coup, dans la mâe de fagots, il y a eu du bruit, une vipère peut-être ? La vache a pris peur, elle est partie en traînant ma grand-mère. O buyë, o fouissë, mins grand-mère ne disë pu rin. Nan la crëyit ben  passë ! O n'ëtë que bërluzë mins tossë itou !"  (L'Harmattan, 1995, p. 250). On voit bien ici qu'Ernestine fait une commutation de code volontaire pour mieux décrire la petite vache  appelée La Riboulette. Bi-lingue, elle montre ainsi sa maîtrise des deux langues qu'elle différencie bien.

                           Une personne humaine est toujours le produit de ses rapports sociaux avec les autres, rapports dont l'histoire de vie d'Ernestine témoigne. Mais, inversement, comme l'écrit le linguiste Jean-Yves URIEN (La trame d'une langue: le Breton, Ed. Mouladurioù hor Yezh, 1987, p.35) : " La communauté résulte aussi de ce que sont et de ce que font les personnes qui la constituent; parmi lesquelles de fortes têtes qui tirent à hue et à dia et font les histoires (et l'Histoire) !" Ernestine fait partie, avec notamment Albert POULAIN, l'un des plus célèbres conteurs gallo, de "ces fortes têtes" qui ont permis au gallo d'émerger à un moment où certains étaient prêts à l'embaumer. Tout en défendant sa langue, sa culture gallèse, Ernestine assume sa place de femme dans un monde en mutation : déjà dans sa biographie elle nous en avertit clairement lorsqu'elle narre son mariage : " A notre mariage, nous sommes restés jusqu'au matin, par contre, nous n'avons pas fait de retour de noce (...) Et puis ça changeait déjà : autrefois le jeune homme quand il arrivait dans la maison de la future mariée, avant de se rendre à la cérémonie, il ne la trouvait pas. Il fallait qu'il la cherche ! Dans le chemin, dans l'écurie, elle n'était pas là ! Il allait dans une grange plus loin, personne ! Elle était cachée, il allait la chercher accompagné de son garçon d'honneur et parfois ils la trouvaient dans une masure délabrée. La fille qui s'est mariée huit jours avant moi l'a encore fait, mais moi je n'ai pas voulu. On commençait déjà à perdre cette coutume et puis nous vivions côte à côte; ça n'empêchait pas qu'on ne se voyait que le samedi et le dimanche; mais enfin, ça ne rimait à rien de faire semblant de se chercher, juste avant la cérémonie !"

(L'Harmattan, 1995, p.270, se reporter aussi à l'analyse de ce rituel, 2ème partie, ch.VIII, (4) : comparaison de rituel avec le conte de la fiancée substituée).

                                                                                                            A suivre

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24 juin 2010 4 24 /06 /juin /2010 10:32

Prise en compte  du gallo à l'école

 

                    Le pays gallo correspond à la partie orientale de la Bretagne comprenant les départements de Loire Atlantique, Ille-et-Vilaine, Est des Côtes d'Armor et du Morbihan. le gallo, langue longtemps méprisée, souvent désignée par le terme de "patois", connaît un regain d'intérêt depuis les années 1970, notamment grâce à des Associations militantes comme Bretagne gallèse ou des associations de collectage comme la Bouêze, travaillant souvent en lien avec DASTUM. Les conteurs tels qu' Alain BURBAN, Albert POULAIN, dans le pays de PIPERIA, Ernestine LORAND de Concoret dans le pays de Brocéliande, vont contribuer à mieux le faire connaître et les fêtes gallèses de Monterfil, les Assemblées gallèses de Concoret vont connaître à partir des années 1980 un grand succès populaire.

 

                 Si l'instituteur Gabriel LE COQ, membre de l'Institut Coopératif de l'Ecole Moderne (ICEM Freinet) le prend en compte à l'école, il est bien seul à cette époque et cela même dans le mouvement Freinet qui pourtant prône un accueil de la parole de l'enfant. Freinet écrit notamment que l'acquisition par l'enfant de la technique de l'écriture et de la lecture doit se faire en liaison naturelle avec la vie, donc avec le langage qui en est l'une des manifestations les plus expressives. Le langage naturel de l'enfant nécessite de comprendre, de ne pas briser l'élan d'une expression orale libre et spontanée. Il pense que l'école doit prendre appui sur ce langage pour rendre accessible la langue française, non pas superficiellement mais activement, pas à pas, en liaison avec l'expression naturelle première. En tant que sociolinguiste, je partage entièrement ce point de vue pédagogique et c'est d'ailleurs ainsi que je commencerais à développer l'enseignement du gallo avec les instituteurs de Haute-Bretagne. Quant à Gilles Morin qui deviendra Président des Amis du Parler gallo, puis de Bretagne gallèse, il fut son élève à Pléboulle dans les Côtes d'Armor. Alors que nous serons nommés tous les deux Coordinateurs de l'enseignement du gallo par le Recteur Rollin en 1981 (Gilles ayant son poste dans un Collège rennais tandis que le mien est rattaché à l'Ecole Normale des Instituteurs qui deviendra l'IUFM de Bretagne), Gilles me dit souvent, quand nous sommes amenés à nous déplacer parfois ensemble vers les écoles et Collèges de Haute-Bretagne, cette belle poésie en gallo entendue dans la classe de son instituteur Gabriel LE COQ :

 

                                      Mon petit baté

 

Mon petit baté boudet,

do ta grande étouéle

q'ersembèle à un oésè,

tous les jhous jtë subéle.

 

Batè de la neit e du médi,

si biaù sû la grande iaou,

au mitan des aùtes batiaù,

tu me fais ténan pyési !

 

La mer s'aperchë de taï,

coum eune mére de son qeniaù

e ma je chânte dans le vent :

Baté boudet emën maï !

 

Baté tout neu, si frey, si biaù

nan s'en ira tous les deux sû l'iaù

diquaù bout de not destin

coum des galants qi n'ont pou de rin.

 

                                                                    Gabriel LE COQ

 

 

                                                        Mon petit bateau

 

Mon joli petit bateau

avec ta grande voile

qui ressemble à un oiseau,

tous les jours, je t'appelle.

 

Bateau de la nuit et du midi

si beau sur la mer

au milieu des autres bateaux,

tu me fais tant plaisir

 

La mer s'approche de toi,

comme une mère de son enfant,

et moi je chante dans le vent

Joli bateau emmène-moi !

 

Bateau tout neuf, si frais, si beau,

on s'en ira tous les deux sur l'eau

jusqu'au bout de notre destin

comme des amoureux qui n'ont peur de rien.

 

                                                                                        traduction Christian LERAY

 

                                                                                                                 Biographies  à  suivre

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11 juin 2010 5 11 /06 /juin /2010 12:12

 

 

 

                                         MONSIAUS DE PILHOTS

 

 

                Su la grand pias,

                Les comëdiens

                O lou bouklës d'orais

                E lou brasëleis

                Chomeint lou baraks

                Eyou qi precheint

                Boun Aventoure

                Les garsais de cez nous

                Aveint grand pou

                Des comëdiennes ëfrontës

                O lou cotilhons bariolës

                N'alleint-ti point rapinë

                Ou ben nous enkraudë ?

                Nona, les garsais

                Ne vëyeint point

                La zieuterie des coueffes

                Qi lou precheint

                Du solail de la vie

                Les garsais ne vëyeint pu

                Qe les monsiaux de pilhots

                Su lou grande pias.

                 

 

                                                          Christian Leray, Le monde en antamas, Lian, 1986

 

              Cette poésie  en gallo est liée à ma biographie car elle parle des gitans qui s'installaient parfois sur la place de la commune où je suis né à Parigné (près de Fougères, Ille-et Vilaine). Mes grands-parents qui vivaient avec nous parlaient couramment gallo, langue parlée en haute-Bretagne, c'est-à-dire dans la partie orientale (Loire-Atlantique, Ille-et-Vilaine, Est des Côtes d'Armor et du Morbihan). 

 

                    Traduction

 

                     Les tas de chiffons

 

                 Sur la grande place

                 Les gitans

                 Avec leurs boucles d'oreilles

                 Et leurs bracelets

                 Dressaient leurs tentes

                 Où ils disaient 

                 La bonne Aventure 

                 Les gens de chez nous

                 Avaient peur

                 Des gitanes effrontées

                 Avec leurs jupes multicolores

                 N'allaient-elles pas voler

                 Ou bien nous ensorceler?

                  Non, les gens

                  Ne voyaient pas

                  Le regard des femmes

                  Qui leur parlait

                  Du soleil de la vie

                  Les gens ne voyaient plus

                  Que des tas de chiffons

                  Sur la grande place.

 

                                                                                   Christian Leray

                                                                              Le monde en antamas

                 

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6 juin 2010 7 06 /06 /juin /2010 09:35

                                 "Et un jour, je décidai de partir pour Huesca où, avec l'aide de Monsieur le Secrétaire de la Diputacion - ce fut le seul homme responsable politique qui sut me comprendre et m'accepter telle que j'étais - je fis une demande de  passeport afin de trouver cette liberté à laquelle j'aspirais tant, et de rencontrer ce père que j'allais enfin connaître. Et notre rencontre fut un jour mémorable et inoubliable !

 

                                 Je voudrais dire ceci à ceux qui vont me lire : n'ayez pas pitié de moi à cause de toutes les souffrances, injustices et mauvais traitements que j'ai endurés, car je ne suis pas la seule dans ce cas : des milliers et des milliers d'enfants et de jeunes gens ont souffert de la même façon ou ont dû supporter des épreuves pires que les miennes car chacun a eu son Histoire et tous doivent apporter leur témoignage car ces tragédies si cruelles ne doivent pas demeurer dans l'oubli !

                     

                                   J'ai, de plus, la confirmation que cette misère nous a tous aidés, aujourd'hui, à nous unir afin de parvenir à donner à Notre Pays la Paix, la Démocratie et cette Liberté si précieuse et si difficile à atteindre. Mais maintenant que nous y sommes parvenus nous la vivons avec toute l'intensité possible et nous voulons que le monde entier en profite, en jouisse et participe à cette Liberté. Oui, jouissons de cette Liberté si compliquée et si difficile à atteindre ! Disons oui à la Liberté !

 

                                    Hélas, ce sont toujours les enfants qui doivent endurer et répondre des actes de leurs parents, supporter les guerres, les régimes dictatoriaux, la misère. Ne vous étonnez pas que nous devenions adultes avec un grand sentiment de révolte en notre for intérieur et que lorsque nous avons atteint l'âge mûr nous n'acceptions pas les injustices, d'où qu'elles viennent !

 

                                     Notre vie est une lutte incessante pour la Justice et la Liberté, cette Liberté pour laquelle j'ai lutté tant d'années, cette Liberté que j'aime tant, qui m'anime avec force pour poursuivre la lutte, cette Liberté que j'ai enfin trouvée lorsque j'ai quitté mon Pays, cette Liberté si difficile à atteindre, que rien n'altèrera et dont personne ne pourra me priver, hormis la mort !"

 

                                                                                               Angeles

 

 

Merci de continuer à mettre vos commentaires de la biographie d'Angeles et n'oubliez pas comme je l'indique  au Québécois et à l'Espagnol qui ont réagi suite à la publication de cette biographie, que vous pouvez vous rendre sur les sites du Réseau des Ecoles de Citoyens RECit  www.recit.net  et de l'Association de Recherche Internationale sur les Histoires de Vie et Biographies Educatives ASIHVIF-RBE  www.asihvif.com sites sur lesquels nous avons mis des articles en ligne et plus particulièrement l'article "Biographie et citoyenneté : une recherche-action bio-politique". Merci de votre participation. 

 

                                                                                                                        Christian Leray 

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5 juin 2010 6 05 /06 /juin /2010 07:30

                               "Mais qui était cet anarchiste rouge pour qe l'on persécutât sa fille à ce point, pour qu'on la privât de tant de libertés et qu'elle fût en droit de subir tant d'injustices ?

 

                                C'est ce que je me demandais fréquemment. Tous ces malheurs me rapprochaient encore plus de mon père, ce Républicain qui se trouvait si loin de moi et chaque jour plus près de mon coeur ! Je ne le connaissais pas mais il me semblait le connaître après cette  tragédie, car la révolte qui animait ce père, je l'héritais moi, sa fille, et cet héritage je le conserve toujours.

 

                                Ce père qui n'avait pas accepté la défaite, qui avait lutté pour son idéal. Cette défaite, ce fut sa honte. Cette défaite en fit un être désespéré. Cette défaite l'isola complètement : il était devenu un homme amer, asocial, qui n'acceptait la présence d'aucune personne. Il vivait plongé dans les souvenirs de sa guerre, de cette Deuxième République qu'il ne supportait pas de voir abattue, qu'il adorait plus qu'une femme. Et il mourut seul, avec ses souvenirs, à Paris !

 

                                                            Ô, Père Anarchiste, Révolutionnaire, Républicain,

                                                            Tu ne sais pas et tu ne sauras jamais

                                                            Combien tu m'as fait souffrir !

                                                            Et combien je souffre encore aujourd'hui

                                                            Car ton fantôme m'a suivie

                                                            Et continue de me suivre

                                                            Tu seras comme cette souffrance que j'endure

                                                            Tout au long de ma vie

                                                             Et qui s'éteindra avec moi...

                                                           

 

                                Comment oublier qu'à 21 ans, je partis vivre avec ma mère, malgré le déchirement que j'avais en quittant cette famille qui me chérissait - et je partageais ce sentiment ! Ce fut une terrible décision car c'étaient mon oncle et ma tante qui m'avaient tirée de cet enfer que j'avais connu (ils constituent aujourd'hui la seule famille que j'ai eu la chance d'avoir). Mais la présence de mon tuteur, cet avocat phalangiste, m'était insupportable : je devais fuir pour tenter de jouir de cette Liberté à laquelle j'aspirais tellement.

 

                                 Mais quelle déception en arrivant à Figueras, chez ma mère ! J'y trouvais une mère franquiste, une mère sûre de son autorité qui voulait me soumettre à sa domination et qui avait oublié qu'elle m'avait abandonnée alors que je n'avais pas encore 2 ans !

 

                                 Ma présence lui rappelait mon "Rouge" de père, comme elle disait. Entrer dans cette famille, qui m'était si étrangère car je n'y connaissais personne et je n'avais eu aucune relation avec elle, même s'il s'agissait de ma mère et de ma soeur, fut un nouveau calvaire. Quelle déception lorsque je les connus ! Je les imaginais si différentes ! Je devrais dorénavant endurer de nouveaux tourments. On me reprochait continuellement d'être la fille de mon père. Quelles horreurs, quelles atrocités n'ai-je pas entendues ! Je ne pouvais les supporter. Je me disais : comment une femme qui m'avait portée dans ses entrailles, qui m'avait donné le jour, bref, comment ma mère pouvait-elle me mépriser à ce point, moi, sa propre fille ?

 

                                Et tout cela parce que j'étais l'image d'un mari qu'elle détestait maintenant, qui était pour elle pire qu'un ennemi, car ce père était tout son contraire : un révolutionnaire, un anarchiste, un guérillero, un Républicain (un Rouge), et pour moi un Héros. Quand je prenais sa défense, elle me faisait mener une vie insupportable, me traitant de Rouge, me disant que j'étais comme mon père.

 

                                C'est ainsi qu'au bout de trois mois de vie en commun, excédée, je quittai le foyer maternel, menant pendant quelques mois une vie errante, seule..."

 

                                                                                                               Biographie à suivre

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4 juin 2010 5 04 /06 /juin /2010 17:48

                                   "En 1947, le 12 février, ma mère vint me voir pour la première fois : ce fut le coup le plus cruel - l'estocade - qu'elle pût me donner car en faisant une enquête sur sa vie privée - elle vivait séparée de son mari et avait un ami - les soeurs me firent mener une vie pleine de tourments ! L'année suivante, en 1948, mon père eut l'idée de m'écrire depuis la France, et l'on m'attribua alors le crime le plus grand qu'un être puisse avoir commis : elles avaient la preuve écrite que j'étais fille de Rouge : on ne me donna pas la lettre !

 

                                   Aussi, quelques jours plus tard, le 7 juin 1948, on me réveilla à 5 heures du matin et l'on me conduisit aux toilettes. La soeur se saisit d'une paire de ciseaux et d'un rasoir et elle se mit à raser ma tête ! Je criais et je pleurais. On me frappait pour me calmer, en vain. Puis, on m'intima l'ordre de me laver et de m'habiller. Alors, une religieuse m'accompagna à la gare routière de Huesca et me fit monter dans un autocar. Elle monta avec moi. Nous arrivâmes à Saragosse, dans une maison de correction, car pour l'administration de Huesca j'étais devenue une personne indésirable.

 

                                   Ainsi donc, pour me surveiller, l'on dut m'enfermer et me punir plus sévèrement. Je n'étais, en fin de compte, pour les autorités franquistes et les religieuses, qu'une criminelle. Voilà ce que fut mon enfance et ma jeunesse : une perpétuelle persécution, pour être fille de Rouge et d'une mère indigne !

 

                                   Comment oublier ces cruelles années passées à Saragosse ? Ce fut si dur que mon corps, pourtant habitué à tous les mauvais traitements, ne put alors les endurer. Et l'on dut me soigner plusieurs fois dans un hôpital dont les salles étaient surpeuplées et où je voyais de vieilles femmes mourir de la tuberculose et d'autres maladies.

 

                                   Non, à 16 ans l'on ne peut oublier tous ces mauvais traitements, toutes ces humiliations, ces séjours à l'hôpital, ces morts anonymes : ils ont laissé des traces et sont bien gravés dans ce corps aujourd'hui vieilli qui est le mien, car je suis sûre que tous ces mauvais traitements sont à l'origine de ma mauvaise santé actuelle (on m'a reconnu un pourcentage d'invalidité de 80 %).

 

                                    Comment oublier qu'enfin, à 18 ans, mon Républicain de père, parvint à me tirer de ce calvaire de Saragosse, en demandant à son frère aîné de me faire sortir de cet enfer et de m'accueillir chez lui. Mon oncle et ma tante le firent, et pourtant ils avaient cinq enfants à charge; ils acceptèrent de s'occuper de moi et me firent entrer dans leur famille : ce furent les seules années où je connus une vie de famille, car mes cousins m'accueillirent comme une soeur. Mon oncle et ma tante me protégeaient. Quand mon oncle rentrait chez lui après son travail, il me disait toujours : "Gamine - c'est ainsi que l'on appelle les jeunes filles en Aragon - tu as mangé !" Bref, il me considérait comme sa fille. J'avais enfin une famille qui s'intéressait à moi, qui veillait à ma dignité et respectait ma personne.

 

                                      J'avais une famille qui manifestait toujours son indignation face à l'injustice. Mon oncle voyait en moi Tomas, son frère qu'il aimait tant !

 

                                       Mais si ma famille put me tirer du calvaire de Saragosse, ce fut avec les conditions mises par l'administration, c'est-à-dire que je ne pouvais pas jouir d'une entière liberté puisque l'on nomma et l'on m'attribua un tuteur, un avocat phalangiste de Pont de Suert, de ce temps-là. C'est ainsi que mon tuteur devait prendre des renseignements et surveiller mon comportement. Il venait très souvent me voir à la maison, me demandait si j'assistais quotidiennement aux offices religieux et il m'observait dans la rue : il était mon ombre !

 

                                        Cela dura jusqu'à mes 21 ans car mon tuteur avait reçu l'ordre de faire des rapports sur mon comportement aux autorités de Huesca. Chacun ne peut imaginer à quel point la persécution franquiste s'acharna sur moi. N'oublions pas que j'étais le fruit d'un adversaire du fascisme, "le Rouge" !

 

                                                                                                             Biographie A suivre...

 

N'hésitez pas à réagir et à apporter éventuellement votre témoignage dans cet Espace biographique : ANGELES répète souvent l'expression "Comment oublier ?" - que pensez-vous de "l'obligation d'oubli" imposée en Espagne par la loi votée en 1977 ? Peut-on fonder une Démocratie solide sur l'oubli imposé aux citoyens d'un pays ?

 

 

                                   

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4 juin 2010 5 04 /06 /juin /2010 07:05

                            " Comment une enfant peut-elle grandir ainsi, sans aucune aide, en proie à une rage si forte, si profonde, qu'elle était prête, de retour à l'orphelinat, à tout casser, à insulter la soeur afin d'être punie, privée de sortie le dimanche suivant pour ne pas participer à ces promenades fascistes qui nous déchiraient le coeur et nous laissaient si amères ! Comme j'étais heureuse ces jours-là où je parvenais à rester enfermée sans participer à cette mascarade franquiste ponctuée par les cris incessants de "Franco si, Comunismo no !" - le communisme était devenu le pire ennemi du franquisme !

 

                            Comment oublier qu'à l'âge de 10 ou 11 ans nous devions déjà participer aux durs travaux de nettoyage, laver à genoux ces interminables couloirs, ces réfectoires, ces dortoirs, ces ateliers, ces classes, ces toilettes, avec des brosses, en frottant de toutes nos forces pour que tout brille et que l'on puisse s'y refléter comme dans un miroir, sinon c'étaient les punitions, les coups, et l'obligation de recommencer à nettoyer ! Comme elles prenaient plaisir ces religieuses à nous voir souffrir et pleurer !

 

                              Non, nous ne pouvons oublier qu'à 14 ans nous devions aller au lavoir pour laver nos vêtements, hiver comme été, dans une eau si froide que nos mains et nos poignets se gerçaient, que nous pelions et que pour soigner nos plaies nous devions uriner sur nos mains car c'était là le meilleur remède pour la cicatrisation de ces gerçures qui nous faisaient souffrir en nous empêchant de dormir. Mais nous supportions cela avec joie car ainsi nous nous dispensions de sortie dans ces rues si connues, pavées et étroites, en criant et en saluant ces franquistes qui prenaient plaisir à nous voir.

 

                              Comment oublier mon père, ce Rouge que je ne connaissais pas et à cause duquel je souffrais et je souffrais tant que parfois je lui vouais une haine terrible, ce personnage paternel à la fois si lointain et si profondément ancré en moi ! Oh, comme j'aurais aimé le saisir et le détruire au point de ne rien laisser subsister de lui, mais, en même temps, un frisson s'emparaît de tout mon être, si fragile et si fort, et je désirais ardemment le serrer dans mes bras et l'embrasser car, après tout, ce n'était que mon père, ce père que je ne connaissais pas et que je voyais, du plus profond de moi-même, comme un Héros, un Dieu auquel j'adressais mes pensées et mes prières qui lui seraient toujours destinées, à lui qui avait préféré défendre la seconde République Espagnole, son Pays, Mourir pour lui, avant de penser à ses filles !

 

                              Comment oublier toutes ces prières, toutes ces oraisons, tous ces chants liturgiques que nous devions répéter sans cesse plusieurs fois par jour - c'était notre pain quotidien - pour la santé du Caudillo et pour la Patrie. On nous forçait à prier ainsi, sinon les punitions s'abattaient à nouveau sur nous. Comme c'est étrange, quand j'assiste maintenant à la cérémonie d'enterrement d'un être cher qui a disparu, ou d'un ami, je suis incapable de réciter une seule prière, un Notre Père ou un Ave Maria ! C'est peut-être parce que durant tant d'années je les ai récités par obligation routinière.

 

                               Non, je ne peux pas oublier ces fillettes nationalistes qui avaient droit aux bons traitements, à l'affection de ces soeurs qui avaient un comportement si différent à leur égard, au sort heureux qui était le leur, avec la possibilité de faire des études, et qui nous insultaient continuellement lorsque nous pouvions jouer ensemble, nous traitant sans cesse de filles de Rouges.

       

                               Non, il est impossible, d'oublier que notre sort à nous, filles de Rouges, était bien différent : nous n'avions que le droit d'être considérées comme des créatures inutiles, de pauvres servantes, les filles de rien et de personne, chargées d'accomplir les tâches manuelles, si dures à nos âges. Pas d'études ! Pas de droit à la culture, pas de droit à un peu d'affection, pas de droit au bien-être, pas de droit à une vie normale. Enfin, que représentions-nous pour cette administration, pour ces religieuses qui se montraient si dures envers nous : rien, nous étions les filles du péché, les filles indésirables, les filles des Rouges. Si elles avaient pu marquer au fer rouge nos corps endoloris, elles l'auraient fait !

 

                                 Non, il n'est pas possible que ces traitements si différents, si injustes, si iniques, si douloureux, si durs, s'effacent de nos mémoires, de nos coeurs, où ils sont gravés et présents à tout jamais. Seule la mort nous délivrera de ce poids et de cet héritage si lourd à porter et qu'il est impossible de faire partager pour qu'on ne le revoit plus, puisque jamais personne n'a écouté cette génération, qui est la mienne, d'enfants de Républicains espagnols qui ont été élevés en Espagne sous le régime franquiste. Non, nous n'avons pas eu la possibilité de proclamer cela, de le transmettre pour éviter l'oubli et que cela se reproduise ! "

 

                                                                                               Biographie à suivre

 

N'hésitez pas à commenter ou à proposer des témoignages personnels ou d'amis espagnols.

                                                                                                  

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4 juin 2010 5 04 /06 /juin /2010 04:27

            OUVRIR UN ESPACE BIO-POLITIQUE DE RECHERCHE BIOGRAPHIQUE

 

                              Lors d'un atelier d'écriture organisé dans un "café interculturel" à Rennes,  l'Espagnole ANGELES me confie un manuscrit de sa biographie dont sont extraites les pages biographiques qui suivent. Elle espère que cette biographie en appellera d'autres afin de croiser différents regards sur l'histoire de son pays et d'autres pays du monde ayant bafoué, à un moment de leur histoire, la liberté citoyenne de leur peuple.

                              Que ceux et celles qui seront sensibles à cette espérance d'ANGELES n'hésitent pas à ajouter leurs commentaires ou témoignages à la suite de cet article. Sachez qu'ANGELES ne pouvait penser, quand elle écrivait ce texte il y a quelques années, que la chape de silence sur la mémoire des victimes de la dictature franquiste entretenue par la loi d'amnistie de 1977 allait brusquement être contestée en 2010, notamment lors d'importantes manifestations de soutien au juge Baltasar GARZON dans toutes les grandes villes espagnoles. On a vu ainsi les gens commencer à témoigner devant les micros des télévisions, certains faisant partie d'enfants républicains enlevés à leur mère dans les maternités avec la complicité de religieuses qui annonçaient la mort du nouveau-né à sa mère désemparée, n'osant pas mettre en cause la parole d'une infirmière religieuse, alors que pendant ce temps-là le nouveau-né était remis à une famille franquiste. Il y aurait eu environ 30 000 enfants soustraits ainsi à leur mère parce que le mari ou elle-même était soupçonné(e) d'être républicain(e) !

                               Certes, le Conseil Général du Pouvoir Judiciaire espagnol vient de suspendre, le 14 mai 2010, le juge Baltasar GARZON de ses fonctions, conséquence de sa mise en accusation pour avoir voulu enquêter en 2008 sur les crimes amnistiés du franquisme (150 000 Républicains disparus dans des fosses communes).Cette mesure prise à l'encontre du juge Baltasar GARZON fait suite à la décision prise par un magistrat du Tribunal suprême d'ordonner l'ouverture d'un procès pour abus de pouvoir après la plainte pour "prévarication"  formulée par des organisations extrémistes comme la Phalange. Le juge GARZON est mondialement connu pour avoir fait interpeller en 1998, à Londres, l'ex-dictateur chilien Augusto Pinochet et il a notamment reçu le soutien de nombreux juristes dans le monde qui estiment que les crimes contre l'humanité sont imprescriptibles et que cette loi d'amnistie de 1977 n'est pas conforme au droit international. Une autre question se pose aussi : peut-on instaurer solidement une démocratie sur l'oubli imposé à tout un peuple ?

      

             BIOGRAPHIE DE LA FILLE D'UN REPUBLICAIN ESPAGNOL - DEUXIEME GENERATION

 

                               " Toute mon enfance et toute mon adolescence se sont passées sous le régime franquiste. Je sais que je ne suis pas la seule qui ai grandi sous un tel régime. Mais je suis l'une de ces enfants de Républicains espagnols - des Rouges, ainsi qu'on le disait en ces temps de fascisme. J'eus le malheur d'être abandonnée, avec ma soeur jumelle qui s'appelait Luisa qui mourut environ trois ans plus tard et qui est enterrée dans le cimetière de Huesca. En effet, ma mère accompagnée de sa soeur nous avait laissée à l'orphelinat et les recherches faites ensuite par l'administration de la Résidence Provinciale de Huesca (orphelinat) sur nos parents leur permirent de s'apercevoir que nous étions filles d'un Rouge (Républicain espagnol). Et l'on nous fit subir beaucoup de mauvais traitements, de punitions, de mépris et d'humiliations. Nous devions tout supporter avec résignation sinon c'était le cachot où l'on nous tenait enfermées dans l'obscurité...

                                 Huesca fut bombardée et ces bombardements détruisirent la moitié du bâtiment. Il y eut des morts et des blessés. C'est pourquoi les autorités prirent la décision de nous transférer à Saragosse. Les personnes âgées et les adultes restèrent dans cette ville, les enfants, on nous emmena à Calatayud.

                                 Malgré notre jeune âge, nous nous rendions compte que tout ne se passait pas très bien car l'Aragon était régulièrement bombardé, surtout la nuit, car il était alors plus facile de déstabiliser l'adversaire sans se préoccuper des morts, des blessés et des familles déchirées. Je me rappelle que durant notre sommeil, les soeurs nous réveillaient et que nous devions traverser la cour en chemise de nuit pour nous réfugier dans les caves qui devaient nous offrir un abri afin qu'il y ait moins de morts d'innocents ou d'enfants handicapés à vie.

                                  Quelques mois après la fin de la guerre - car l'on devait faire des réparations importantes - on nous transféra de nouveau à l'Hospice de Huesca où l'on organisa peu à peu notre séjour dans la Résidence Provinciale pour enfants. C'était une situation de misère terrible ! Je me souviens, malgré mon jeune âge d'alors - il est vrai que les jeunes enfants qui ont souffert conservent de profondes marques - que l'on nous choisissait, nous, les enfants des Rouges, pour accompagner, avec un sac sur l'épaule, la religieuse et aller faire du porte à porte pour que l'on nous donne, qui des lentilles, qui des pois chiches, des haricots, de la farine, du riz, du pain et surtout des navets (qui remplaçaient les pommes de terre). Quand le sac était plein, nous rentrions avec difficulté à l'orphelinat. Les gens ne possédaient pas grand'chose et chacun donnait ce qu'il pouvait. La présence de la religieuse les poussaient à se montrer charitables. Nous ne pouvions refuser de participer car l'on nous punissait ou l'on nous frappait en cas de refus. Nous devions participer pour aider la Diputacion (Préfecture) de Huesca qui avait quelques problèmes administratifs pour nous fournir de la nourriture.

                                   Je n'oublie pas non plus qu'à l'époque de la récolte des olives c'étaient les filles de Rouges qui servaient aussi de main-d'oeuvre : on nous transportait en chariot pour participer à cette cueillette des olives. Les paysans secouaient les oliviers et les frappaient avec de longues gaules, puis nous remplissions les paniers qui étaient préparés pour cela et lorsque ceux-ci étaient pleins nous les placions dansles couffes que portaient les ânes pour les transporter vers les entrepôts. Les gens du village nous logeaient et s'occupaient bien de nous et nous nourrissaient bien : c'était notre récompense. Ainsi, au cours des deux ou trois années où l'on y alla, ce fut pour nous une sorte de fête !

                                   Je me rappelle que, par manque de la nourriture nécessaire à l'orphelinat, nous avions des problèmes de digestion. Tous les matins, on nous obligeait à prendre une cuillerée d'huile de foie de morue pour libérer les intestins. Parmi les punitions que nous infligeaient les soeurs, nous devions régulièrement nous mettre à genoux, les bras en croix et l'on nous frappait avec une lanière de cuir (on nous flagellait). On nous fouettait le dos et le sang coulait ! Nous pleurions et nous crions, mais en vain. On nous disait que nous devions ainsi expier tous les péchés que commettaient les communistes. D'autres fois, on nous tenait tout un après-midi à genoux pour prier sans arrêt. La raison était identique. Quand des petites filles franquistes faisaient pipi au lit, c'était à nous, filles de Rouges, que l'on mettait le drap, à tour de rôle, sur la tête en nous tenant dans les couloirs, afin que tout le monde puisse nous voir. Pour les soeurs qui s'occupaient de nous, les punitions que nous recevions étaient une satisfaction car, nous étions, à leurs yeux, les filles du péché !

                                      Comment oublier cette cruauté physique et morale qui me poursuivait toujours : j'en rêvais toutes les nuits ! Car à force de subir tout cela, tous ces actes, toutes ces actions, j'étais parvenue à un tel état que je ne pouvais croire que l'on puisse vivre autrement !

                                       Comment oublier tous ces dimanches où je devais m'habiller avec cet uniforme bleu marine, si joli avec sa cape et la coiffure - nous semblions des filles de riches- pour défiler ainsi à travers les riues de Huesca, le bras tendu, en faisant le salut fasciste, forcées de crier "Franco si, comunista no !" voyant comment les gens nous regardaient, certains avec intérêt et d'autres avec indifférence, et nous entendant dire souvent : "Voilà les filles de Rouges, les filles de rien !"

                                                                                       Biographie à suivre...

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3 juin 2010 4 03 /06 /juin /2010 22:04

 

                                                        ECRITURE

 

                                     J'écris

                                      Parfois sur mes paupières

                                      Fermées

                                      Pour cause de rêve

 

                                      J'écris

                                       Parfois sur mes lèvres

                                       Fermées

                                       Pour cause de guerre

 

                                       J'écris

                                       Parfois sur mes mains

                                       Ouvertes

                                        Pour cause d'amour

 

                                         J'écris

                                         Souvent sur mon coeur

                                         Ouvert

                                          Pour cause de poésie.

 

                                                                                      Christian Leray, Le monde en antamas, Ed.Lian, 1986.

                                           

 

                                                             ABRIR A CORTINA

                                            

                                              Abrir a cortina do passado

                                              toda a canção do meu Amor

                                              ai que saudade me da !

                                              não tem fronteira

                                              de Amor

                                              então acontece a magia

                                              ganhamos de presente

                                              da eternidade

                                               a paixão.

                                                                                         Christian Leray, São Paulo, 2009

 

                                                              OUVRIR LE RIDEAU

 

                                               Ouvrir le rideau du passé

                                                toute la chanson de mon Amour

                                                quelle nostalgie cela me donne !

                                                il n'y a pas de frontière

                                                d'Amour

                                                alors se produit  la magie

                                                 nous gagnons du présent

                                                 de l'éternité

                                                  la passion.                       

                                                                                            

                                                  

                                                   

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3 juin 2010 4 03 /06 /juin /2010 19:14

                Lors de mon premier retour du Brésil en 1981, la musique de la langue brésilienne m'a inspiré ma première poésie dans ma langue maternelle : le gallo (langue d'origine romane parlée en Haute-Bretagne à l'est d'une ligne StBrieuc-Vannes qui, à l'instar du portuguais du Brésil, possède de nombreuses diphtongues et notamment des diphtongues nasales). Cette poésie intitulée Qante vous Alfa Gente que l'on peut traduire par  Avec vous Alfa Gente (nom de l'ONG brésilienne avec laquelle nous avons préparé la mise en place d'un Centre d'Education et santé dans la favela de FLORIANOPOLIS dont je parle dans mon article précédent) va être suivie de plusieurs autres à la fois en français et gallo qui constitueront mon premier recueil de poésies intitulé Le monde en antamas publié par les éditions du Lian avec l'aide de l'Institut Culturel de Bretagne en 1986.

                  "L'antame, comme l'expliquait mon collègue enseignant et Conseiller pédagogique de gallo à l'instar de moi, Gilles Morin, président aussi à l'époque de l'association Bretagne gallèse, qui a préfacé mon recueil de poésies, c'est plus quotidiennement en gallo le premier morceau de pain que l'on coupe et qu'on offre le plus souvent..." :

 

                                    QANTE VOUS ALFA GENTE

 

                    Qante vous Alfa Gente,

                    Q'aetes mezë ben chomeis,

                    Je savions nous dezenheudë

 

                     Qante vous Alfa Gente,

                     J'alions qri des sëlheys d'iaù,

                     Dika le pus, ghër ben faraù 

 

                      Qante vous Alfa Gente,

                      L'iaù poganouze e crassouze

                      Ërdvint lavouze e beuvouze

 

                       Qante vous Alfa Gente,

                       J'avions plantei des solais

                        Dan les coers e les dais.

 

 

                                    Traduction : 

                                      

                                        AVEC VOUS ALFA GENTE

 

                        Avec vous Alfa Gente

                        Qui êtes maintenant bien debout

                         Nous savions nous libérer

 

                         Avec vous Alfa Gente,

                         Nous allions chercher des seaux d'eau

                          Jusqu'au puits délabré

 

                          Avec vous Alfa Gente,

                           L'eau poisseuse et sale

                           Est redevenue potable

 

                           Avec vous Alfa Gente,

                           Nous avions planté des soleils

                           Dans les coeurs et les doigts.

  

                                                                              Christian Leray

                

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