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27 juillet 2010 2 27 /07 /juillet /2010 18:06

POESIE-BIOGRAPHIE

en Hommage à Bernard Giraudeau

 et aux Veilleurs de VieP1030493

 

     Précédemment, en mettant en ligne "Poésie en Hommage à Bernard Giraudeau et aux navigateurs", soudain m'est venu à l'esprit le titre du livre "Veilleurs de Vie" de Marie-Odile de Gisors (L'Harmattan, 2009) car Bernard a été et continuera par ses écrits immortels (je pense notamment à son livre Cher Amour) et son engagement à être un "Veilleur de vie" notamment pour les personnes atteintes d'un cancer.

 

     Ainsi que Marie-Odile le dit  dans son langage poétique "Nous sommes tous : Veilleurs de vie, Tisserands d'humanité, Porteurs de pollens. Il ne suffit que de réveiller en nous cette humanité profonde qui veille sans relâche au coeur de notre être". Justement, ainsi que je l'écris dans la préface qu'elle m'a demandée de faire pour son livre : "Les récits de Marie-Odile peuvent faire écho, résonance en chacun de nous parce qu'elle puise ses ressources d'écriture poétique à l'essence même de la vie...il est assez significatif que Marie-Odile se définisse comme "veilleuse" voire "éveilleuse" ou mieux "réveilleuse" se référant ainsi à Gaston Bachelard pour qui "la rêverie cosmique" nous permet d'aller au fond de son "essence", bref de l'essentiel de la vie. Un paysage peut nous chavirer, nous ravir dans une sorte de conscience cosmique. De tels moments intenses renvoient aussi à des heures propices où l'oiseau de l'oeil sait accommoder ciel intérieur, paysage intérieur et extérieur..." (préface p.12).

 

    Bernard Giraudeau a su, lui aussi, nous faire part de "moments intenses" dans ses livres et je me souviens en particulier de ce qu'il a écrit dans son roman Les dames de nage (Métailié, 2007, p.17) "J'ai gardé ce plaisir à rejoindre aux premières lueurs les landes fumeuses, les bords de mer encore mauves abandonnés par les hordes humaines. J'aime les silhouettes des arbres, l'élégance des ramures au milieu des prairies, les ombres sur les dunes sahariennes, les villages flottants sur les lacs cambodgiens... Je donnerais toutes les suites du Carlton pour un bivouac et un feu de bois sec, pour de l'eau fraîche au creux des mains à faire ruisseler sur le torse nu, pour les frissons de bonheurauxpremières lueurs"                                                                                                                                                                                          

    

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26 juillet 2010 1 26 /07 /juillet /2010 23:47

POESIE en Hommage à Bernard GIRAUDEAU

               et à tous les navigateurs

 

               Oser être heureux

               c'est accepter

               de l'être tout de suite

               c'est savoir apprécier

               la fragilité et l'éphémère

               de l'évènement. 

 

                                                                 Christian Leray, 26 juillet 2010

 

 

               Ce poème est en lien avec ma poésie  "Saisir l'instant" précédemment publiée ainsi qu'avec les écrits de Bernard GIRAUDEAU qui affirme qu'il ne faut "pas remettre sa vie à demain...ni l'amour..." car "la maladie sans l'amour, c'est la mort". J'ajouterais bien volontiers sans l'amitié aussi !

 

       Justement, souvent, les témoignages d'amour et d'amitié affluent à la mort d'une personne, n'est-ce pas dommage de ne pas les lui exprimer de son vivant !  J'ai eu la surprise et le bonheur de recevoir récemment les témoignages d'amitié et de soutien de l'ensemble des collègues et membres du CA de notre association ASIHVIF-RBE (Association Internationale des Histoires de Vie et Formation - Recherche Biographique en Education) accompagnant le magnifique livre offert La petite bibliothèque maritime idéale de Stéphane Heuet (Arthaud, 2010). Je ne vais pas citer l'ensemble de leurs écrits qui m'ont profondément touché mais simplement celui de Daniel FELHENDLER qui me paraît faire la synthèse de l'ensemble :

      "Depuis le message que tu nous as adressé pour nous informer de la dure épreuve que tu dois traverser, depuis ton courriel donc, je me remémore les moments forts que nous avons vécus ensemble.

      Grâce à toi et à votre équipe, j'ai découvert en septembre 1998, au Congrès de Rennes, la richesse et la portée existentielle du courant des histoires de vie dans le monde francophone - à travers les représentants actifs de ce réseau international que j'ai pu ainsi rencontrés. Plus tard, nous avons partagé des moments forts et intenses de table ronde sous ta direction et sous ton impulsion.

      Proche de toi et de ton approche, je pense très vivement à toi dans ce passage éprouvant.

      Avec mes très chaleureuses amitiés." Daniel 

       

          Oui, merci chers collègues du CA, soyez certains que "la mer et ses histoires fabuleuses" me redonnent "courage" comme tu me le souhaites si bien France ! En effet, j'apprécie ce livre de Stéphane Heuet qui écrit et "dessine" (de nombreux dessins accompagnent les textes choisis) sa bibliothèque maritime idéale. Dans la mienne figureraient certainement des pages d'Henry de Monfreid, d'Ernest Hemingway et aussi ce magnifique poème de Charles Baudelaire "L'Albatros" qui a accompagné toute mon adolescence; je me souviens en particulier de la fin de ce poème :

 

        "Le poète est semblable au prince des nuées

        Qui hante la tempête et se rit de l'archer;

        Exilé sur le sol au milieu des huées,

        Ses ailes de géant l'empêchent de marcher."

 

       

 

             

 

                         

 

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20 juillet 2010 2 20 /07 /juillet /2010 15:31

POESIE - SAISIR L'INSTANT

ET "METTRE DES MOTS SUR NOS MAUX"


 

                                 Laisser l'instant

 

                                 dans sa plénitude

 

                                 enfanter la vie

 

                                 nourrir l'élan

                              

                                 pour fertiliser

 

                                 nos rêves

 

                                 enracinés

 

                                 dans la réalité

 

                                 féconde de l'instant.

 

 

                                    Christian Leray, 18 juin 2010

 

 

                   J'ai écrit cette poésie le jour de l'anniversaire de ma fille pour célébrer  l'instant et rappeler à tous que chaque nouveau jour n'est qu'un sursis de plus pour la vie dont il faut savoir profiter  à chaque instant ! 


                   J'aurais aimé offrir aussi cette poésie inédite à Bernard Giraudeau dont les écrits montrent qu'en tant que grand voyageur, il a su profiter justement de chaque instant; je pense bien sûr à Carnet de voyage mais aussi à ses romans et en particulier Les dames de nage (Ed. Métailié, 2007) où il nous embarque, au fil des amours de ses héros, de l'Afrique à l'Amérique du Sud; il écrit notamment (2007, p.11) : "J'apprends l'attente, celle de l'instant, celle de la pluie, des jours à venir, de la nuit, de la première étoile, celle du feu pour les repas et pour réchauffer les soirs. J'attends sans impatience, en vivant l'instant comme une éternité..."

 

                   De nouveau, merci Bernard pour tes messages, que j'ai reçus comme des bouteilles à la mer, qui invitent, notamment chaque patient atteint d'un cancer à devenir acteur de sa propre guérison. La voie de l'écriture que tu as su utiliser avec humilité et talent, permet justement de "mettre des mots sur nos maux".

 

 


 


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19 juillet 2010 1 19 /07 /juillet /2010 09:12

POESIES-HAÏKUS pour "mettre des mots sur nos maux"

 

 

                                                       A Bernard GIRAUDEAU

                            

                              CARNET DE VOYAGE

 

 

                    Force de ton regard

 

                   Eclat-Bleu

 

                  Sur les étendues marines

 

 

          

           J'aurais aimé envoyé ce poème-haïku à Bernard Giraudeau pour le remercier de son vivant, car je fais partie de ces personnes qui, atteintes d'un cancer, sont allées sur son blog et sur le site de La maison du cancer qu'il a parrainée. Ses témoignages ont certainement contribué à ma décision de créer un blog pour "mettre des mots sur mes maux" !

 

            Hélas, je n'ai réussi à écrire le mot "cancer" sur mon blog que le samedi 17 juillet 2010 et le soir-même, au Journal télévisé, j'apprenais avec tristesse la mort de Bernard Giraudeau. C'est mon fils qui, un jour me voyant un peu désemparé, après la découverte de mon cancer du péritoine, m'avait conseillé d'aller sur le blog de Bernard car il savait que je l'appréciais en tant qu'acteur de cinéma, de théâtre et aussi pour ses carnets de voyage. J'ai moi-même la passion du voyage (Japon, Viêtnam, Thaïlande, Canada, Etats-Unis, Maroc, Algérie (Universités de Rabat et Alger) sans oublier mes fréquents voyages en Europe et surtout au Brésil, ce pays-continent si cher à mon coeur, que j'ai parcouru du nord au sud et d'est en ouest depuis 1983, y séjournant même pendant six mois en 2009. 

 

              J'ai beaucoup apprécié les paroles de Bernard Giraudeau quand, dans une interview, il a écarté le mot "lutter" contre le cancer qu'avait inclus le journaliste dans sa question en disant qu'il avait plutôt "apprivoisé" son cancer et avait-il ajouté "apprivoisé aussi la mort". Bernard Giraudeau avait raison car "lutter" épuise, alors qu' apprivoiser est une manière de "vivre avec" en recouvrant la sérénité. Cela me rappelle l'interrogation d'une collègue et amie suisse de l'Association Internationale des Histoires de Vie et Formation (ASIHVIF) qui avait perçu une certaine sérénité dans mes paroles face à la situation dans laquelle je me trouvais et qui se demandait si cela était dû au fait que je travaillais sur les biogaphies. Certes, ces biographies que j'ai récemment mises en ligne (Biographie de la fille d'un républicain espagnol, Biographies d'habitants d'un mutirão brésilien, sans oublier les Biographies en pays gallo qui font partie de ma vie),  il est certain que cela m'a aidé à ne pas m'enfermer sur moi-même et au risque de me répéter, des paroles comme celles de Bernard Giraudeau m'ont été salutaires ! Bernard avait même employé la métaphore de "nouveau bateau" en parlant de son cancer, en ajoutant qu'il lui avait "ouvert les yeux", entre autres, sur le sens de la vie, ce qui m'a inspiré ce nouvel Haïku que j'adresse en Hommage à Bernard Giraudeau :

 

                                       Navigateur,

 

                                       tu as su apprivoiser la mer.

 

                                       Avec ton "nouveau bateau",

 

                                       tu as "apprivoisé" le cancer

 

                                       Vogue désormais en paix !

 

                                                 Christian Leray, 17 juillet 2010

 

 

 

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17 juillet 2010 6 17 /07 /juillet /2010 10:16

Poésie-Haïku pour "mettre des mots sur nos maux"


 

                          Désirs de mots

 

             Etranges sensations

            

             Un courant de mots

             

             Parcourt mon ventre

 

             Désirs inépuisables

 

                        

                                                 Christian Leray, 16 juillet 2010

 


 

          D'où me vient ce Haïku écrit spontanément :

- de ma découverte de la culture japonaise lors d'un séjour de deux semaines au Japon avec une équipe de recherche des Universités rennaises et de l'INRA, conduite par ma collègue sociologue Hiroko?


- de mes lectures de Haïku et du plaisir de percevoir à travers ces haïkus tant de sentiments, de sensations physiques ... exprimés de façon si concise !

 

          Sans doute de tout cela et de bien d'autres choses, plus ou moins conscientes, que je ne saurais exprimer aujourd'hui. En tous les cas, voilà bien le genre de poésie que je ne me sens pas capable d'écrire en Portuguais du Brésil, peut-être parce que j'y ai vécu un tel débordement de vie que je ne saurais l'exprimer de façon aussi concise ! Grâce à une Brésilienne, j'ai appris à penser en Brésilien : miracle de la vie et de l'amour ! Je viens d'ailleurs de créer un blog brésilien pour pouvoir partager, notamment ces poésies, avec mes amis brésiliens car en les traduisant, j'ai l'impression de perdre l'énergie de ces mots et en quelque sorte de les trahir, d'en trahir la vie !

 

           Justement parlons de ma vie avec un cancer, car ce haïku en est aussi l'expression ! Ne croyez pas que le mot cancer me soit facile à exprimer et je pense, après avoir été sur le site que m'a conseillé le cancérologue Dominique Elias de l'IGR (Villejuif) qui va m'opérer de ce cancer du péritoine, que je ne suis pas le seul à éprouver des difficultés à l'écrire ! Notre génération n'a-t-elle pas été imprégnée par cette image symbolique d'un cancer représenté sous forme de crabe ! Une espèce d'imagerie populaire qui a marqué toute une génération : heureusement, que de chemin parcouru  depuis ! Je vais adhérer à cette association et participer à ce blog que m'a conseillé le docteur Dominique Elias car en le lisant j'ai bien perçu combien il était important de "mettre des mots sur nos maux" !

            

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10 juillet 2010 6 10 /07 /juillet /2010 11:17

Au-delà du simple collectage : les histoires de vie personnelles et collectives

 P1030471(1)Oui, Merci à toi Ernestine qui n'a jamais cessé d'oeuvrer pour le gallo depuis les Assemblées gallèses qui se dérouleront dans les années 80 pendant sept années consécutives à CONCORET. Tu continueras d'ailleurs à participer, notamment aux Assemblées de LA CHEZE, allant toujours de l'avant ainsi que tu le disais en concluant ton histoire de vie (L'Harmattan, 1995, page 345) :

 

                       " En faisant mon histoire de vie, je me suis rendu compte de l'importance de nos racines pour aller de l'avant. C'est comme ça que j'ai tout retrouvé ! Comme je te l'ai dit, je suis sûr que les jeunes ont besoin dans ce monde déboussolé de parler avec leurs grands-parents, de faire le lien avec le passé et le présent. Dam i sont-ti point vra benaizes de prechë gallo !"

 

                        Ernestine, une militante du gallo jusqu'à ce que sa santé le lui permette. Dernièrement, en 2006, elle s'était encore excusée auprès de l'Association Bërtayen Gallèse, à l'occasion de la fête des 30 ans de l'association, lors du festival Mill-Goll, de ne pas pouvoir y participer à cause de sa santé défaillante.

 

                        Ernestine, tous ceux qui t'ont côtoyé ne t'oublieront jamais, toi qui as trouvé le chemin d'accomplissement de soi sans jamais renier tes origines gallèses que tu as su faire fructifier pour en faire une richesse culturelle commune, tu peux aujourd'hui reposer en paix, tu demeureras présente dans nos esprits !"

 

                                                      Christian Leray

            Texte d'accueil des personnes à l'église de Concoret le 11 mars 2008, jour de l'enterrement d'Ernestine Lorand

 

                                           Dans ce texte que j'ai lu avec beaucoup d'émotion à l'instar du petit-fils d'Ernestine, j'ai notamment souhaité que l'on se souvienne de son oeuvre intergénérationnelle, souci que j'ai retrouvé chez le Maire de Parcé, Mr Lézin Galais, dans les Actes de la Table-Ronde "Oralité et Dynamiques territoriales - La Culture Gallèse, un atout pour la Haute-Bretagne organisée par la Granjagoul dans l'amphi du Lycée Edmond Michelet de Fougères le 21 septembre 2007 : "...La culture est transversale, on la retrouve dans tous les secteurs d'activité, dans le social, dans l'économie. Je crois qu'il faut voir la culture comme axe de développement transversal. Ce sont des thèmes à travailler .Quand on fait des manifestations du style du Prix Froger Ferron (manifestation annuelle organisée par la Mairie de Parcé, rendant hommage à deux accordéonistes locaux Victor Froger et Francis Ferron, le 3ème  week-end de septembre, regroupant de nombreux musiciens traditionnels à l'occasion d'un concours musical) on crée aussi du lien social fort. Il y a là, plusieurs générations, il y a aussi des catégories sociales différentes, des relations ville-campagne. C'est très important pour les personnes car les lieux de rencontre sont de plus en plus rares et on a besoin de créer de tels lieux de rencontre"  (2007, pages 54-55).

                                   C'est pourquoi je pense qu'il faut aller au-delà de la simple collecte, laquelle pouvait certes se justifier au siècle dernier à un moment où les ethnologues eux-mêmes pensaient qu'ils collectaient les derniers textes, dernières légendes auprès de représentants de cultures qui allaient disparaître. Or, aujourd'hui, il y a, chez de nombreux jeunes la volonté de s'approprier cette culture dans leur vie actuelle. Ainsi, dans les mêmes Actes Oralité et Dynamiques territoriales, ai-je exprimé, par exemple, qu'aujourd'hui "Dans le collectage de contes, on voit bien qu'on ne se contente plus maintenant de collecter le conte tel qu'il est raconté par une personne. On redonne enfin la place à la parole, à la vie du conteur..." (Actes "Oralité et Dynamiques territoriales - La Culture Gallèse, un atout pour la Haute-Bretagne", 2007, p.35)

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10 juillet 2010 6 10 /07 /juillet /2010 06:20

Maison du Patrimoine Oral de Haute-Bretagne ( LA GRANJAGOUL)

 

                           En ce qui concerne le travail intergénérationnel dans le pays gallo, il est important de faire référence aux projets de la Granjagoul à Parcé dont le Président est Pierrick Cordonnier avec qui j'ai beaucoup travaillé dans les écoles et collèges lorsqu'il était président de la Bouêze (la bouêze est le nom de l'accordéon diatonique typique du pays gallo). Pierrick avait notamment encouragé, par de grands rassemblements de bouêzous (joueurs d'accordéon), les anciens à sortir des greniers ou placards les accordéons dont ils ne se servaient plus. Tous, enfants, jeunes et anciens s'étaient retrouvés à jouer ensemble dans ces grands rassemblements qui ont beaucoup contribué à faire connaître la culture gallèse. Nous avions notamment parlé de cela avecDSC00643 des professionnels de la ville de Fougères (cf photo ci-jointe) lors de notre intervention aux côtés de Monsieur Lézin Galais, Maire de Parcé,  qui s'est beaucoup investi avec nous pour faire naître la Maison du Patrimoine Oral de Haute-Bretagne à Parcé, près de Fougères et que l'on appelle en gallo La Granjagoul.

                             

 

     photo ci-contre avec Lézin Galais à gauche

                     "           Christian Leray à ses côtés

      lors d'une intervention commune à Fougères

 

 

Lors de la Table-ronde organisée par La Granjagoul en 2007 et ayant pour thème "Oralité et dynamiques territoriales - La culture gallèse un atout pour la Haute-Bretagne" , Bruno Delamarche, à propos des "Rendez-vous contés" qu'il organise dans le pays de Fougères, évoque ainsi l'importance de l'intergénérationnel : "(...) notre public, à nous, 60 ans de moyenne d'âge ... Encore une fois, il y en a d'autres qui font bien mieux que nous pour attiirer les jeunes dans un souci pédagogique (...)J'ai quand même une image de la soirée du 28 août : il y avait un petit gamin, je pense qu'il a passé une soirée exceptionnelle parce qu'il a ri pendant trois heures (...). Moi, j'ai envie de dire, la suite de tout ça, c'est sûrement la Granjagoul !"  (Actes de la table-ronde 2007, p.48)

                               

                                       Ernestine Lorand a appris à jouer de la bouêze à 61 ans et elle nous a fait part, lors de son récit de vie, de son souci de transmettre son savoir à toutes les générations qui se retrouvaient près de sa maison dans l'ancienne Maison de Bretagne gallèse appelée La Soett :

 

" J'ai donc appris à jouer de la bouêze à 61 ans et j'en suis ben benaize (contente), car maintenant que je suis en retraite, eh ben s'il y a un petit coup de cafard, tu comprends, eh ben allez hop ! je prends mon accordéon. Et c'est ce que je dis à beaucoup de gens, les anciens ... comme les jeunes..."

 

                               Hélas, Ernestine nous a quittés en mars 2008, mais comme je l'ai dit lors de son enterrement le 11 mars 2008, son oeuvre, notamment intergénérationnelle se poursuit. Le meilleur exemple en a été donné par son petit-fils qui, ce jour-là, a lu dans l'église son poème créé en gallo que nous avons cité précédemment. Sa famille m'a demandé de faire l'accueil, ce qui témoigne des liens qui se sont poursuivis avec Ernestine et sa famille bien au-delà de la parution du livre :

 

                                "Merci à tous d'être venus si nombreux vous rassembler autour d'Ernestine pour lui rendre hommage. Volontairement, je ne dis pas un dernier hommage, comme il est coutume de le dire, car à travers ses livres (notamment son recueil de 33 poèmes intitulé "Ernestine tout simplement" et aussi la première histoire de vie en gallo, parue en 1995, qu'elle a réalisée avec moi), elle continuera à vivre dans nos esprits.

 

                            Une histoire de vie qu'elle m'a racontée de 1986 à 1991, le plus souvent dans sa maison jouxtant la Soett. Elle nous parle bien sûr de cette vie de labeur mais aussi des mutations agricoles, elle, qui est née le 24 janvier 1921 à St Meen Le Grand. Après s'être mariée en 1943 et avoir vécu quelques années sur une petite ferme à Gaël, elle a dû quitter celle-ci et déménager pour Concoret en 1952 où son mari avait commencé à travailler dans une entreprise de travaux publics. Son histoire de vie est alors jalonnée d'évènements liés à la culture gallèse : les travaux communautaires qui marquaient la vie de nos campagnes bretonnes, les fêtes religieuses et profanes, la musique qui comptait tant pour elle qu'elle apprendra à jouer de la bouêze (nom gallo de cet accordéon diatonique du pays gallo) à l'âge de la retraite. Bel exemple pour toutes les générations et c'est vrai qu'elle les côtoyait toutes, les enfants comme les anciens, elle savait les accueillir autour d'un "cafë ben chaùd tchi ercaùpi"  comme elle disait dans cette langue gallèse qu'elle a su  si bien faire chanter à nos oreilles dans ses chants, mais aussi à travers ses contes qu'elle avait appris en gallo auprès de son père, des légendes aussi de son beau pays de Brocéliande qu'elle aimait tant et qu'elle a contribué à faire connaître à tous ceux qui passaient à la Maison de Bretagne gallèse devenue la Soett, un véritable Centre d'accueil, au sens littéral du mot Soett.

 

                             Un jour, Ernestine m'a tendu un texte pour l'ajouter à notre livre, texte que venait de lui donner une commerçante de Concoret :

 

                             Concoret

                             Un pays qu'on oublie,

                             Mais non, aujourd'hui

                             Concoret revit

                             Une étincelle a jailli

                             Pour réveiller notre pays

                             Et voici qu'ils arrivent

                             Venant du Nord et du Midi

                             Tous curieux, ébahis

                             Des richesses de notre pays

                             Pour cette bëluette

                             Cette étincelle de vie

                             Je dis merci !

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

                                       

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6 juillet 2010 2 06 /07 /juillet /2010 14:52

Réponse poétique d'Ernestine à son petit-fils :

 

                         Petit-fils

                     si le temps qui passe

                     te jette un doute,

                     prends le temps présent

                     suis ta route !

                     Le temps qui passe

                     est éphémère.

                     Le temps présent

                     sur cette terre

                     est précieux

                     à ta grand-mère

                     qui a la chance de te voir

                     si présent pour elle

                     par ce temps qui passe

                     et s'efface un instant,

                     de temps en temps

                     de sa mémoire

                     pour oublier

                     la souffrance du monde

                     et revivre la sagesse

                     de ces années encore

                     imprégnées de bonheur

                     après ce temps si long

                     qui a paru si court,

                     à l'ombre du passé

                     est toujours présente

                     pour que ta sagesse

                     par ton expérience acquise

                     de mon savoir primaire

                     basé sur mes racines profondes

                     reste à l'écoute

                     de mes derniers balbutiements

                     après un temps qu'on ne définit pas

                     et qui ne finit pas dans l'au-delà

                     qu'il soit présent dans un futur temps

                     pour que ce temps présent

                     qui passe et s'efface

                     continue de passer

                     jusqu'à la fin des temps

                     ressortira de ma mémoire

                     pour aller habiter ton esprit

                     que le temps ne pourra effacer.

 

                                                        Ta grand-mère qui est à l'écoute

                                                         de ton temps

                                                         celui qui passe

                                                         celui qui reste

             Quand j'ai montré ça à ma fille et à mon gendre, ils n'en revenaient pas que j'avais écrit cela; c'est pourtant bien moi toute seule, mais tu vois nous échangeons tellement bien mon petit-fils et moi, ça nous enrichit tous les deux; nous réfléchissons ensemble à toutes sortes de problèmes et puis il y a les échanges avec tous les gens qui viennent à la Soett (...)"

                               (C.Leray, E.Lorand, Ed.L'Harmattan,1995, p.337)

 

               Nous voyons bien ici l'importance de l'échange intergénérationnel qui permet notamment de donner aux enfants des repères temporels et culturels. Certes, l'école a un rôle important dans la reconnaissance de la langue et de la culture. Gilles Morin et moi avons ouvert cette voie pour la prise en compte de la langue et de la culture gallèses aussi bien dans les écoles maternelles et primaires que dans les Collèges et Lycées grâce aux deux postes créés par le Recteur académique  en 1982 : celui de Gilles rattaché à un Collège de ZEP et le mien à l'Ecole Normale de Rennes. Tout était à construire et Gilles, à l'instar de moi, avons toujours pensé que notre travail pédagogique et didactique devait prendre appui sur le patrimoine culturel et les personnes (musiciens, conteurs ...) qui participaient à son développement ainsi que sur les liens intergénérationnels avec les grands-parents. Grâce à l'Association des Enseignants de Gallo créée par Gilles Morin et moi, laquelle a regroupé rapidement un grand nombre d'enseignants qui sont ainsi devenus des interlocuteurs avec le Rectorat, nous avons pu, notamment, inclure dans l'épreuve orale facultative du Bac, la réalisation par les candidats d'un petit Mémoire qu'ils effectuaient le plus souvent avec l'aide de leurs grands-parents ou de personnes d'une autre génération de locuteurs gallos. Cette option a connu un vif succès et a contribué parfois à retisser des liens culturels entre diverses générations. D'ailleurs, de nombreux jeunes nous ont dit qu'ils avaient été écouter en famille des conteurs gallos notamment lors des fêtes de la bogue à Redon où ils ont pu rencontrer le conteur Albert Poulain. Nous nous sommes tous réjouis de la distinction bretonne du collier de l'Hermine qui lui a été attribué. C'était la première fois que l'Institut culturel de Bretagne remettait cette distinction à un Gallo, reconnaissance d'une grande portée symbolique quand on songe  qu'une certaine commission linguistique de l'Institut Culturel de Bretagne avait fonctionné quelques années auparavant en utilisant comme langue unique le Breton celtique, feignant ainsi d'ignorer les 2 ou 3 membres gallos de la commission qui ne parlaient pas le breton celtique. Mais soyons juste ce manque d'ouverture linguistique n'était pas partagé par la majorité des membres de l'Institut Culturel. 

                         

                       Quant à l'Education Nationale, elle avait reconnu, dès le début de la création de nos deux postes, notre travail d'ouverture de la voie de reconnaissance linguistique et culturelle du gallo à l'école : pour cela Gilles et moi avons participé aux réunions de mise en place des Zones d'Education Prioritaire. Celles-ci ont été une innovation historique aussi bien au niveau pédagogique que financier puisque pour la première fois la répartition des moyens financiers a tenu compte des lieux où étaient implantés les écoles, collèges et lycées ainsi que des résultats scolaires. Même si ma directrice d'Ecole Normale a été un peu réticente au début de la création du poste par le Rectorat à l'Ecole Normale d'Instituteurs devenue ensuite IUFM de Bretagne, il a suffi d'une inspection de sa part au cours de mon travail de Conseiller pédagogique dans la Z.E.P. rurale d'Antrain et Tremblay pour qu'elle se rende compte du grand nombre d'enfants mélangeant sans discernement gallo et français, notamment lors de la conjugaison du passé simple qui, en gallo, est proche du parfait latin, pour qu'elle perçoive l'intérêt d'un tel enseignement aidant les enseignants à différencier les langues avec leurs élèves pour les aider à  mieux maîtriser chacune d'entre elles. Elle avait apprécié "les passerelles sociolinguistiques" créées et m'avait fait attribuer les Palmes Académiques quelques années après, sans m'en parler, sachant que je les aurais refusés si elle m'avait fait part de sa demande. Après avoir longtemps ignoré cette distinction, ne la mettant jamais dans mes CV, je reconnais avoir eu tort, car à la différence de certaines distinctions aujourd'hui distribuées à n'importe qui, allant parfois jusqu'à des "remerciements" d'hommes politiques à des financiers plus ou moins scrupuleux, les Palmes Académiques demeurent une distinction non "galvaudée" préservant ainsi leur valeur symbolique de reconnaissance d'un travail pédagogique.

 

                  Nous appuyant sur les recherches les plus récentes en sociolinguistique, et notamment les travaux de Poplack et de Gumperz aux Etats-Unis (cf. analyse critique de mon livre par J. Dumazedier), nous avons pu aider les enseignants à les appliquer pédagogiquement dans leur classe en différenciant bien les temps de Langage du temps de travail grammatical sur les Langues. Dans les espaces-temps de Langage, l'enseignant doit accueillir la parole de l'enfant. C'est d'ailleurs ce qu'avaient bien compris intuitivement les grands pédagogues tels que Freinet en France et Paulo Freire au Brésil, lequel travaillant notamment avec des adultes analphabètes, préconisaient d'écouter d'abord leur parole pour noter les "palavras geradoras" qui ne sont pas seulement les "mots-clés" comme cela a été traduit en Français mais des mots inscrits dans la dynamique de vie des personnes. Un enseignant peut donc chaque matin accueillir la parole de ses élèves soit en grand groupe ou en favorisant des exposés de petits groupes. Ce travail sur le langage va lui servir de base à son travail sur la ou les langues, travail qui nécessitera un apprentissage grammatical et que l'enseignant peut transmettre de façon magistrale alors qu'il lui faudra organiser  ensuite des ateliers d'application sous forme d'exercices personnels et aussi par groupes. Un tel enseignement des langues et cultures nécessite donc un savant dosage de travail oral et écrit. Malheureusement en France on a trop tendance à privilégier l'écrit au détriment de l'oral, ce qui explique en partie le manque de maîtrise linguistique des élèves !

                

                  Cette réflexion pédagogique est incluse dans notre travail sur les biographies, notamment en pays gallo, car il s'agit bien d'écouter d'abord la parole de la personne avant de prétendre l'éduquer. Précédemment, avec Ernestine, nous avons vu aussi combien est important dans l'éducation d'un jeune le dialogue intergénérationnel.

 

                                                                                                    A suivre


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5 juillet 2010 1 05 /07 /juillet /2010 12:15

 

Traduction de la poésie en gallo lue par le petit-fils d'Ernestine dans l'église de Concoret le mardi 11 mars 2008 :

 

                                            Ma petite Mémé

                           Maintenant, je suis ici bas depuis 37 ans

                           Il y en a même qui m'appellent Monsieur

                           Mais maintenant, je suis comme un gamin tout éploré

                           Parce que sa petite grand-mère est partie.

                           Je pense aux crêpes, à toutes ces nuits

                           Au nouvel an avec tes petits enfants

                           Mais maintenant, je suis tout éploré

                           Ma petite mémé est partie.

                           Il n'y a pas de noir, il n'y a pas de blanc, il n'y a que des gens !

                           Il n'y a pas de riche, il n'y a pas de pauvre, il n'y a que des gens !

                           Ne regarde pas tant l'apparence des gens

                           Mais regarde bien, écoute bien, et regarde plutôt ce qu'ils ont en eux!

                           Tu peux te reposer heureuse, Mémé

                           Nous autres, on a bien tout écouté

                           On essaye d'être des gens bien, d'aller de l'avant tant qu'on peut

                           Et comme toi, quand c'est difficile,

                           On recommence jusqu'à ce qu'on y arrive.

                           Ta voix roulait comme les rocailles sur la terre où tu es née

                           Entraînant mille souvenirs dans son sillage

                           Le chêne du Gallo n'est pas prêt de tomber

                           Tu es de ceux qui n'ont pas permis qu'il soit déraciné.

                           Tu ne te redresseras plus ma petite mémé

                           Mais j'entendrai toujours ta voix dans mes oreilles

                           Et chaque fois, au printemps, quand j'entendrai le merle qui siffle

                           Je penserai, elle n'est pas bien loin, ma petite mémé qui s'en est allée.

 

                Cette poésie de son petit-fils me fait penser à l'échange qu'ils avaient eu ensemble sur le temps passé, présent et futur et dont elle m'avait fait part le 31 janvier 1990 : "Mes petits-enfants me voient faire des contes, des poésies, ils en parlent avec moi (...) Mais ça leur fait bien plus que plaisir puisque le plus grand qui a aujourd'hui 20 ans et qui fait partie d'un groupe de musique, compose parfois des chansons et écrit des poésies. Tous les deux, nous dialoguons bien ensemble et je vais te lire la dernière qu'il m'a remise :

 

                                               Le temps d'une grand-mère

 

                              Le présent qui s'efface

                              nous met dans le doute

                              Incertitude devant le présent

                              qui ne cesse de naître

                              et dont nous faisons partie.

                              Peur du temps qui passe

                              peur de perdre le temps

                              qui s'efface, qui se perd

                              Grand-mère

                              le temps est encore passé

                              sa trace est dans ta mémoire

                              mémoire des hommes

                              de l'amour, de l'existence

                              qui t'apporte la sagesse

                               pour nous éviter la souffrance

                               Reste grand-mère

                               reste à l'écoute

                               de notre doute

                               donne-nous la sagesse

                               de ton expérience

                                                                               un petit-fils qui croit savoir

                                                                et qui a besoin de toi

                                                                pour apprendre qu'on ne sait jamais rien.

                                                                     (L'Harmattan, 1995, p.336)

                               

                                   

                                

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30 juin 2010 3 30 /06 /juin /2010 23:28

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              Dans la Revue française de pédagogie (1996, numéro 116, p. 150-151), le sociologue Joffre DUMAZEDIER fait une analyse critique pertinente de mon livre que je transcris en partie toujours dans le même but signalé à la page précédente, aider le futur lecteur à mieux se repérer dans ce livre scientifique, tout en prenant plaisir à lire la biographie d'Ernestine :

" C'est le récit d'une vie modeste dans le Morbihan. Le gallo est une langue qui se parle encore en Bretagne, à l'est d'une ligne St Brieuc-Vannes. Il a des liens avec les parlers d'oïl de Normandie, du Maine, d'Anjou, de Vendée et jusqu'en Picardie. Alors que le Breton est une langue celtique, le gallo est une langue d'oïl. Tous les deux furent interdits à l'école jusqu'à une date récente. C'était évidemment pour que puissent se répandre plus facilement dans l'ensemble du peuple de France  les disciplines de la difficile langue française. Aujourd'hui, les temps ont changé. Depuis les années 1980, le gallo est enseigné aussi bien dans des collèges et des lycées ainsi qu'à l'Institut de Formation des Maîtres de Bretagne...

"Il n'y a pas que l'école qui forme !", dit Ernestine et elle le prouve. Mais comment une simple cantinière de 65 ans, à la retraite, a-t-elle pu s'autoformer, apprendre, par exemple, à jouer de la bouêze (accordéon diatonique du pays gallo), écrire un recueil de poésies ... (ceci est étudié avec précision dans la seconde partie).

Quant à la première partie, elle est saluée par la revue Langage et société. Elle nous parle avec une compétence savante de parler gallo, de l'alternance gallo-française, de l'identité gallèse et du pays qui la soutient. Cette étude sociolinguistique utilise les questions et les concepts d'un éminent sociolinguiste américain John GUMPERZ. Celui-ci a renouvelé l'analyse du bilinguisme et du multilinguisme aujourd'hui si répandus et si peu contrôlés à l'école dans un monde si perturbé par des mouvements d'émigration et d'immigration d'une ampleur sans précédent...

Dans la seconde partie (pp.127-228) sont observées et analysées les pratiques sociales d'autoformation d'Ernestine dans le contexte culturel qu'elle a vécu aux différents âges de sa vie. Selon le mot de Christian Leray, il s'agit là d'une "biographie éducative" (ou autobiographie éducative ?) distincte d'une simple histoire de vie. Pourquoi et comment émerge cette créativité extraordinaire ? Tableaux et schémas rendent plus concrets ce travail scientifique d'analyse. Une bibliographie très sélective constitue un précieux guide de lecture tant en sociolinguistique qu'en sciences de l'autoformation. On appréciera dans ce livre que les pratiques d'autoformation soient souvent identifiées en partant d'indicateurs précis que fournit la sociolinguistique. Cette étude échappe ainsi aux considérations subjectives, polémiques ou idéologiques qui souvent rendent peu fiables les récits des histoires de vie bourrés d'illusions  autobiographiques. Cette biographie éducative n'exclut pas l'enseignement scolaire imposé à chacun par la loi. Elle l'intègre totalement avec ses influences positives, négatives ou nulles, plus ou moins conscientes. On aimerait que les auteurs d'histoires de vie poussent encore davantage ce genre d'analyses critiques. Enfin, il apparaît ici que l'histoire de vie peut apporter une ressource variable à l'autoformation du sujet, qu'elle s'insère dans une trajectoire sociale."

              En relation avec ces commentaires du sociologue Joffre Dumazedier, je transcris ici de nouveaux extraits de mon livre où Ernestine nous parle d'une tradition culinaire en Haute-Bretagne : la galette de sarrasin (encore appelé en Haute-Bretagne "blé noir") et qu'elle illustre d'une chanson accompagnée de sa bouêze (accordéon diatonique typique du pays gallo qu'elle a appris à jouer au moment de sa retraite) :  

                                               

                                                                    La meire Amelin

                                                      

                                                 La meire Amelin fait de la gallette

                                                 Le peire Amelin va qri les bûchettes (bis)

 

                                                                    refrain

 

                                                Ah y en fit sept le galichon

                                                Le peire Amelin la trouvit ben boune

                                                Ah y en fit sept le galichon

                                                Le peire Amelin trouvit ça ben bon !

 

                                                La meire Amelin fait de la bonne soupe

                                                Le peire Amelin li casse les croûtes (bis)

  

                                                La meire Amelin s'en va à la messe

                                                Le peire Amelin ira vair sa coueffe* (bis)

 

                                                La meire Amelin en fut ben marri

                                                Le peire Amelin avë eune bonne amie (bis)

 

                   Ernestine commente sa chanson en disant :  Il y a comme cela sept couplets car j'ai composé cette chanson dans la tradition sur une musique de "pas de sept" qui est l'une des danses parmi les plus pratiquées dans le pays gallo. (p.262)

 

* coueffe terme gallo qui signifie "femme", ici il s'agit de sa maîtresse ou "bonne amie" .

Quant au terme gallo "galichon", Ernestine nous en donne elle-même l'explication (p. 261) :

"... le galichon était la dernière galette : c'était la plus épaisse, ça grinçait sous les dents parfois car il y avait des petits grains de sable parce que ce n'était pas raffiné comme maintenant. Mais la galette était nature ! On la mangeait avec du beurre, du lait ribot (lait baratté, il s'agit de la partie laiteuse qui ne se convertit pas en beurre), des oeufs et même des pommes. On coupait des pommes en fines tranches et quand la pâte était étalée on les parsemait dessus. Quand les galettes étaient cuites, ça cassait quelquefois, mais elles étaient bonnes, bien meilleures que maintenant."

                                

                                                

 

 

 

                                               

                                                    

    

                 

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